(photos : Eloïse Legendre, IFCE)

Fin septembre, début octobre, avec mes neuf copains de promo de L3 de l'Ecole Nationale d'Equitation, nous avons passé une semaine de découverte d' « autres » métiers autour du cheval en Normandie. Un chouette séjour enrichissant !

Au premier trimestre de la 3e année de la Formation Initiale, normalement il est organisé un échange linguistique sur une semaine en Angleterre, à Hartpury. A cause de la pandémie de Covid, nous n’avons pas pu nous y rendre cette année (c'est super dommage, déjà que nous n'avons pu effectuer notre stage de 2e année à l'étranger...). Pour remplacer ce voyage, Eric Deyna nous a organisé un autre séjour, sur le territoire français : durant la semaine du 28 septembre au 2 octobre 2020, nous avons passé cinq jours intéressants et variés en Normandie.

Nous sommes donc partis le lundi matin de l'ENE vers 9h, : toute la promo « Y'a du boulot » dans deux véhicules, un minibus et une voiture, accompagnés par Eric et Eloïse. Direction le Pôle International du Cheval (PIC) de Deauville, où nous avons déjeuné en arrivant.

La première activité du séjour a été la découverte d'une nouvelle discipline (tout du moins pour moi) : le Polo. Pour débuter, le spécialiste de la discipline, Evrard De Spa, aidé par un ancien élève DESJEPS de l’école, David Arlin, nous a montré comment tenir le maillet (seulement avec la main droite) et faire le bon geste pour frapper de la balle au sol. Ensuite, par groupe de deux, nous nous sommes entraînés sur un cheval en bois afin de découvrir la notion de la hauteur à laquelle procéder à la frappe de la balle. Par la suite, nous nous sommes exercés à cheval au pas dans le manège du PIC. Une fois que le geste nous a semblé plus familier, on s'est entraîné en ligne droite au galop, un par un. On a poursuivi de la même manière pour d'autres gestes utilisés lors d'un match et diverses façons de parer le lancer d'un joueur adversaire. Pour finir, on s'est mis en groupe de trois cavaliers et on a fait un match en suivant le règlement de la discipline. Cette activité a été très sympa à découvrir et je ne pensais pas être capable de réussir à taper une seule fois dans la balle !!

Après avoir fait ce que nous avons pu en Polo, nous avons observé et suivi un entraînement sur le plat avec Bertrand Le Barbier et cinq cavaliers de CSO de l'académie Delaveau. Lors de l'échauffement des différents couples, l'entraîneur a donné de nombreuses consignes pour le collectif mais en individualisant ses conseils grâce à des mots-clés. Une fois la séance terminée, nous avons pu parler avec Bertrand de sa façon d'emmener ses cavaliers d'obstacles vers une approche de «  dressage »/plat (la notion de « dressage » amène souvent ce type de cavaliers à ne pas suivre assidûment ces leçons...).

Le mardi, nous nous sommes levés assez tôt pour pouvoir visiter l'hippodrome de Deauville et voir l'entraînement des chevaux de courses de galop. Le directeur du site, Franck Le Mestre nous a fait la visite des écuries, nous a expliqué l'organisation de la structure durant les courses et décrit le processus de gestion des pistes lors des entraînements et des courses. On a pu suivre l’échauffement de plusieurs lots de chevaux de différents entraîneurs, puis discuter avec certains d'entre eux sur les différents types de séances d’entraînement.

Toutes les informations qu'ils nous ont délivrées étaient très intéressantes et m'ont permis de me rendre compte de l'importance de bien connaître son environnement avant de se lancer en tant que professionnel.

Après avoir visité le lieu, compris son fonctionnement et observé des entraînements de galopeurs, nous nous sommes essayés sur un cheval mécanique.  Celui-ci permet aux jockeys de s'entraîner avant une course pour développer la position et le fonctionnement du corps indispensables pour être performant. Pendant nos essais, Anastasia Wattel, entraîneure sur le site de Deauville, a répondu à nos questions concernant le côté technique de son métier, les choix stratégiques à suivre selon la course, selon le cheval, etc. Cet échange était très instructif et nous a vraiment montré qu’il s’agit d’un autre monde, pas du tout le même que celui qu'on connaît dans notre sport équestre.

Lors de l'après-midi, nous sommes allés ensuite à Villers-sur-Mer faire du paddle. Initialement, nous devions faire du char à voile mais il n'y avait pas suffisamment de vent lors de cette journée. Le paddle, de son vrai nom “stand-up-paddle”, est le dernier sport de glisse créé aux Etats-Unis et s'avère en plein développement en Europe depuis 2008/2009. L'intérêt de nous faire faire cette activité était, dans un premier temps, un transfert d’apprentissage. En effet, étant un sport de glisse comme l'équitation, le paddle nous demande de jongler continuellement avec notre équilibre pour tenir sur la planche. Il permet aussi de passer de bons moments avec sa famille ou ses camarades. Il amène un esprit d’équipe, de la coordination avec les autres, et cela était très bénéfique pour le groupe. On a tous passé un bon moment, même si au final nous nous sommes plus amusés que nous avons réellement surfé !

La journée du mercredi a été rythmée par l’anglais et la pédagogie au PIC. En effet, lors de la venue des Britanniques au mois de février/mars de cette année, nous avions réalisé des exposés en anglais sur différents thèmes. Normalement, nous aurions dû présenter ces exposés à des élèves de Hartpury pour faire un exercice d’expression orale. Finalement, nous les avons présentés au reste de la promotion, mais aussi à Antoine Sinniger et Evrard De Spa. Pour certains, c’était le moment d’améliorer leurs prestations par rapport au mois de mars grâce aux retours précédents de nos enseignants. La plupart des sujets étaient les mêmes pour les différents groupes, sauf pour le nôtre : nous avons modifié et amélioré notre contenu à la suite d'une discussion entre nous. C’était, je pense, plus vivant que la première fois et nous étions plus à l’aise dans l’ensemble.

L’après-midi, nous devions chacun encadrer un élève de l’académie Delaveau. Pour pouvoir déterminer qui travaillerait avec qui, nous nous sommes  d'abord tous présentés les uns aux autres  (élèves  de l’académie et élèves en L3).

Pour les trois cavaliers de complet de la promo, on nous a proposé de suivre trois cavaliers de l'académie qui ont des chevaux un peu délicats (voir compliqués sur le plat). Mon élève s'appelait Lise et sa ponette, Irina Del Ara. Le couple participe à des As Poney Elite Grand-Prix (1,30m), comme ce que faisait ma sœur Laurène avec notre Rafale. A la prise en main du couple, j’ai demandé à la cavalière de m'énoncer les points forts et les points faibles de sa pépette et ce qu'elle fait d’habitude pour l’échauffer. Après avoir recueilli certaines informations, on a commencé la détente proprement dite.  J'ai pu voir, très rapidement, que la ponette était très raide au début de du travail et que sa cavalière ne l’aidait pas trop car elle restait elle-même contractée dans son fonctionnement. Après avoir conseillé à Lise d’être plus souple et liante et de mobiliser les hanches et les épaules de la jument,  le  couple  fonctionnait  déjà  mieux.  Sur  les  courbes, à main droite, la ponette s’échappait rapidement sur son épaule gauche. Quand je l’ai fait remarquer à Lise, elle m'a signalé qu'elle ne s’en rendait pas compte.

Une fois qu’elle a compris comment replacer les épaules devant les hanches au pas, elle a pu demander la même chose au trot. Plus elle avançait dans l'exercice, et mieux le couple fonctionnait. Lise m’a même fait remarquer que sa jument prenait beaucoup plus  de  rebond  que d’habitude et qu’elle la sentait plus engagée. Au galop, lrina peut se mettre rapidement à 4 temps et se fâcher. Pour l'aider à mieux galoper, j'ai suggéré à Lise d'alterner entre un grand carré où sur les côtés, elle lui demandait d’être droite et d’avancer, et un grand cercle dont elle rétrécissait le diamètre, en faisant attention à ce que les épaules soient toujours devant les hanches. Une fois tous ces exercices bien réalisés, le couple est resté là-dessus. Pour terminé, j'ai sollicité l’avis de Lise sur la séance, elle était contente d’avoir senti de nouvelles choses, et appréhendé le bienfaits du travail sur la rectitude. Pour ma part, j’ai apprécié lui donner ce cours, c'est une adolescente très studieuse et qui pose de nombreuses questions, cela amène à un dialogue constructif entre l’entraîneur et le cavalier.

Pour la journée du jeudi, nous sommes allés visiter une écurie active, non loin de Deauville, créée par Pascal Frottié, les écuries de Lisors. Le principe est d’avoir des chevaux dans un espace où ils peuvent se déplacer en groupe sans manquer de rien. Le site dispose de 28 hectares de pâtures pour environ 50 chevaux. M. Frottiée s’est tout d'abord énormément renseigné et documenté pour construire ce type d’écurie car en hiver, il faut diminuer la surface pour faire reposer les terres et laisser l’herbe pousser. Ensuite, il nous a montré comment fonctionnait les automates utilisés sur la propriété : chaque cheval possède un collier autour de l’encolure, au niveau de la tête, et grâce à un logiciel, la machine gère ce qu’il a droit de manger (granulés, foin plus ou moins riche). Par endroits, M. Frottiée a dû stabiliser le sol avec des plaques synthétiques pour qu’il soit facile d’entretien et de bonne qualité afin de tenir durant l’hiver. Ce qui est le plus impressionnant,  c’est le gain de temps dégagé aux écuries avec ce type d’installation : pendant la période hivernale, le responsable nous a annoncé qu’il ne travaillait que 3 heures par jour, et le reste de l'année, moins d’une heure !

Ensuite, nous avons eu l’opportunité de visiter les écuries de trot de Philippe Allaire à Victot Pontfol. Le Haras de Bouttemont est assez récent puisque qu’il a été construit en 2011. Mme Allaire nous a fait visiter l'infrastructure, des paddocks stabilisés avec des gros copeaux de bois, au pré en herbe avec abris (stabilisés eux aussi à leur entrée), aux pistes de travail pour les trotteurs. Comme dans le milieu du galop, l’entretien des pistes de travail est primordial et demande une organisation particulière. En ce qui concerne les écuries, chaque cheval est réparti en fonction de son type (juments ou hongres), de son âge, etc.. Chaque écurie a son marcheur, ce qui permet aux chevaux de pouvoir être correctement échauffés car ils ont besoin de faire beaucoup de kilomètres, plus que les galopeurs. C’est un système qui se démocratise de plus en plus et c’était très intéressant de se rendre compte de ce qui fonctionne ou non. Cependant pour ce type d’écurie, il faut que le groupe de chevaux reste le même sur de longues périodes pour éviter d’avoir des conflits et des accidents.

Ready Cash (photo : Le Parisien)

Enfin, nous avons eu la chance de voir le lot d’étalons qui est sur le site (Brillantissime, Bird Parker et Ready Cash, « 2 fois vainqueur du Prix d’Amérique ».). Ils occupent partie des écuries qui est plus orientée reproduction car elle dispose d’un centre d’insémination. Pour conclure, sur cette visite, j'ai trouvé que les infrastructures étaient magnifiques, dans un cadre superbe et les responsables ont tout agencé pour ne pas dénaturer le site. Leur accueil a été aussi extraordinaire que passionnant.

L’après-midi, nous avons eu la chance d'assister aux courses de la demi-nocturne de Cabourg. Le directeur Gilles Ribot, le papa de Vic, nous a accueillis et fait visiter l’hippodrome. Il nous a présenté plusieurs membres importants dans la réussite de ce type d’événement, comme les vétérinaires, les starters, les commissaires, etc. On a pu, par groupe de deux, aller dans la voiture des juges qui suit la course de l’intérieur.

C’était très impressionnant de voir les couples à l’œuvre en étant aussi près d’eux. Pour être sûr de ce qu’ils ont vu durant la course, les juges vont ensuite dans une salle qui leur permet de visionner les images et décider s’il y a des sanctions, ou si un couple est disqualifié pour avoir fait trop de fautes d’allure ou de rythme.

Certains d’entre nous ont même parié sur plusieurs courses. On s’est vraiment rendu compte que ce qui fait vivre les jockeys, les entraîneurs et les organisateurs de ces événements : ce sont uniquement les paris que tous les passionnés font sur les courses !

Pour le dernier jour du séjour, vendredi 2 octobre, nous sommes allés visiter une grande clinique normande, le Cirale. Cette clinique est spécialisée dans la locomotion équine. Le Docteur Claire Moiroud, spécialiste en pathologie locomotrice équine, nous a commenté les lieux et expliqué le rôle des différentes pièces de la clinique, de la salle de consultations, aux salles de radiologie, échographie, IRM, etc. Pour faire les tests sur les chevaux, toutes les machines sont de grande taille, ce qui impressionne beaucoup.   Ensuite,   elle  nous  a  montré  le dernier  bâtiment  qui  vient  d’être  terminé et qui a été inauguré il y a peu. Il s’agit d’un centre de balnéothérapie, avec grande piscine, marcheur aquatique, etc. Le fonctionnement dans l’eau permet de mieux se rendre compte des problèmes locomoteurs.

Avant de rentrer, nous avons fait une halte au Haras du Pin. Nous avons visité le centre de formation de l'IFCE. On nous a expliqué qu’il y avait au Haras, le projet de créer une écurie active pour les chevaux en formation et que celui-ci était déjà bien avancé (on a pu voir la maquette de ce que ça donnerait). On est passé par l’atelier de sellerie et c'était hyper instructif de voir comment sont travaillés les cuirs que nous utilisons au quotidien. Ensuite, nous avons visité le site historique des écuries. Actuellement, il n’y a plus de chevaux dans les grandes écuries, à part les shetlands qui permettent des animations pour les plus petits durant les visites, et les chevaux de spectacle. On a pu admirer des voitures classées au patrimoine de l’Unesco et la tombe de Furioso. J’étais déjà venue plusieurs fois concourir sur le site du Pin mais je n’avais jamais pris le temps d’aller visiter le site historique par manque de temps.